La situation à la mi-décembre 2019 Rohingyas: Une impression de déjà-vu

La Cour Internationale de Justice – principal organe judiciaire des Nations Unies – a tenu de premières audiences au sujet des exactions commises par l’armée birmane à l’encontre des Rohingyas entre le mardi 10 et le jeudi 12 décembre 2019. Aung San Suu Kyi, actuelle ministre birmane des Affaires Étrangères et prix Nobel de la paix 1991, a décidé de défendre elle-même son pays contre les accusations qui lui sont adressées. La plainte a été initiée un mois plus tôt par un petit pays membre de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), la Gambie, qui accuse la Birmanie de violer la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948). Depuis août 2017, plus de 900 000 Rohingyas ont été obligés de se réfugier au Bangladesh en raison des persécutions dont ils font l’objet en Birmanie.

En marge d’une assemblée de l’OCI, le ministre de la justice gambien et ancien procureur au Tribunal pénal international pour le Rwanda, Abubacarr Tambadou, avait déclaré en mai 2018 «nous avions été invités à nous rendre dans le camp de Cox’s Bazar par le gouvernement bangladais. Là, j’ai entendu les récits de tueries, de viols, de torture, de bébés brûlés vifs et cela m’a rappelé le génocide du Rwanda, l’expérience douloureuse de ce génocide et l’échec de la communauté internationale à le prévenir ». Face aux accusations de génocide, la dirigeante birmane a dénoncé un « tableau incomplet et trompeur » qui selon elle ferait fi de la complexité de la situation. Les autorités birmanes se défendent en estimant que leurs militaires n’ont fait que réagir aux attaques de l’Armée du salut des Rohingya de l’Arakan (ARSA), et qu’il n’y a eu ni nettoyage ethnique ni génocide. Aung San Suu Kyi estime donc que «l’intention génocidaire»ne peut pas «être la seule hypothèse» dans la situation de la minorité musulmane rohingya. La demande de la Gambie d’instaurer des mesures d’urgence afin de mettre un terme aux « actes de génocide en cours » se fera- t-elle entendre ?

Charlotte Canizo